Je me souviens très bien de la première fois où je me suis dit que j’aimerai écrire un livre. J’avais 9 ans, j’habitais à Bourges et j’avais écrit une nouvelle qui s’appelait les Snélujes. Tapé sur l’ordinateur familial. Machintosh 1998. Titre et nom écrit en gros caractères. Je l’avais agrafé dans ma chambre, attablée sur mon petit bureau en dessous du velux. C’est un endroit que j’adorais parce qu’il était sombre et lumineux. Que j’étais seule à l’étage de la grande maison mais qu’en bas il y avait quand même du monde. C’était comme un refuge, où je pouvais éclater mon bordel. Les vinyles et les poèmes. Les poupées et la peinture. La chambre me paraissait immense et je me souviens de la moquette rouge dans le couloir et du parquet ciré. De ses rainures où doivent encore être enfoncées quelques une des mes affaires. Perles et larmes.
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La deuxième fois, c’était un livre de cuisine. Il y a 10 ans. Quand je tenais un blog de cuisine avec ma copine Julie et qu’on avait envie de répertorier toutes nos recettes. Projet souvent évoqué à l’apéro, toujours avorté.
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La troisième fois, c’était un roman. Il y a 10 ans, par là, aussi. Dans une autre vie. Que j’ai commencé à écrire il y a 5 ans . Pour lequel j’ai démarré un accompagnement littéraire. En pause. Difficile à écrire. Que je reprends sporadiquement et que j’aimerai écrire en Pologne, à New-York ou à Séville, comme la romancière blindée que je ne suis pas ^^
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La cinquième fois, c’était l’année dernière. En cours. Des nouvelles qui vont peut-être se transformer en roman et qui sortiront peut -être avant l’idée de la troisième fois. Commencée pendant la mise en page de la quatrième fois. Ecrites tantôt à Arcachon, Auxerre, Nantes, le canapé de mon salon, selon.
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Et la quatrième fois, c’était là, il y a 4 ans. Pont des demoiselles. Toulouse. Au 50 avenue Saint-Exupéry. Enfin je présume parce qu’il n’y avait pas de numéro. Et que c’était après le 48 et avant le 52

Je m’étais dit que je ne devais pas être la seule me sentir comme ça. Étroite et coincée. Enserrée au milieu du tout et du rien. Du beau et du moche. Du lisse et des égratignures. Que les sentiments sont universels et que les allégories poussent à chaque coin de rue, comme les petites herbes entre les trottoirs et les murs. Et que j’en aurais bien fait quelque chose.
J’avais rouvert mes carnets éparpillés dans lesquels je griffonnais pensées et idées
Recettes de cuisine, rdv, mesures de mur.
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Phrases entendues au coin d’une rue. Tu sais celles qui ne veulent rien dire quand tu les frôles
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Les mots et les sms des copains, qui sans sans apercevoir balancent des fois des bombes qu’il seraient dommage de laisser s’évaporer.
J’avais regardé mes photos de téléphone. M’étais rendue compte que j’en avait beaucoup. 17535. Que je ne pouvais plus les extraire. J’avais pris un abonnement google cloud parce que 17535 photos c’est 17535 instants de vie. Souvent en triple. Parfois flous.
Je m’étais demandée :
Depuis quand je me sentais comme ça
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Ce que je pourrais bien proposer sans en faire tout un plat et ne pas parler que de moi.
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Quelles photos choisir et quels états ?
Où, quand, comment, pour quoi ?
Quel papier et quel format ?
Quel prix ?
Fanzine, librairies, gratuits.
etc…etc…. etc….
J’ai ébauché des trucs et lâché l’affaire.
Spécialité.
Et il y’a deux ans, quand une histoire s’est arrêtée, j’ai repris. Parce que y’a bien que quand je suis mal que j’écris bien. Que le vide m’angoisse & que l’avenir semble joli si on en a envie.
J’ai choisi et renoncé.
Vois-y ce que tu veux.
J’ai sélectionné des photos et des textes, fait des dossiers sur mon ordinateur comme au boulot. J’ai rencardé mon amoureux pour la couv et une copine pour
J’en ai fait un recueil de poésies. Avec des phrases qui tranchent et des photos floues. Avec le titre en gros et mon nom en plus petit. Il mesure 14 cm par 14cm. Il est doux. Quand tu passes la main dessus. Et dur aussi, parfois, quand ton regard trébuche.
J’ai mis 2 semaines à écrire ce que j’avais envie d’inscrire et 11 mois et deux semaines pour la mise en page, les changements d’avis et chouchouter mon syndrome de l’imposteur.
Quand je tape son titre sur google, je vois qu’il ressort tous les mots que je voulais mettre dedans.

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Tout à l’heure j’ai regardé mes photos depuis 2 ans.
J’ai constaté qu’il y en avait encore plus mais que je ne payais pas plus cher. Que la vie change. Que deux ans c’est :
3 coupes de cheveux différentes
la mer souvent
l’amour que je n’attendais plus
8 kilos de plus
un dos neuf et un nouvel appartement.
de mots qui dansent encore
et la vie qui se poursuit.
Je me suis dit que je ferai bien un volume.2.
Parce que j’aime les nombres pairs et que l’équilibre va par deux.
Ça fait une 6ème envie
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